C’est l’un des outils électroportatifs les plus vendus au monde ; c’est aussi celui dont le taux d’accidentologie est l’un des plus élevés. Nous parlons bien sûr de la meuleuse d’angle de diamètre 125 mm : « Un outil pratique très polyvalent, mais qui est souvent utilisé dans de mauvaises conditions », souligne Maude Demenois, ergonome au pôle d’expertise ergonomie Bouygues Construction.
Les opérateurs ont, en effet, la fâcheuse habitude de la tenir d’une seule main ou de retirer son carter de protection pour en augmenter la maniabilité. Ce qui inévitablement entraîne des accidents, pour certains loin d’être anodins : blessures, projections, effet « kickback » – un phénomène d’éjection incontrôlable de la meuleuse qui peut conduire, selon l’INRS (Institut National de Recherche et de Sécurité), à des accidents mortels. Conséquences ? « Comme aucun outil de ce type sur le marché ne répondait à nos critères de sécurité – démarrage interdit sans carter de sécurité et utilisation obligatoire à deux mains –, nous avons acté l’interdiction des meuleuses d’un diamètre inférieur à 230 mm sur l’ensemble des chantiers du groupe, et ce au niveau mondial. » 

Elaborer un prototype répondant aux exigences
Afin d’aller au-delà de la seule mesure d’interdiction, une démarche d’information et de formation a été menée auprès des opérateurs, comme l’explique Maude Demenois : « Le comité de pilotage Bouygues Construction, composé de représentants de la filière Prévention Santé Sécurité, de Distrimo (Bouygues Construction Matériel), et de Bouygues Construction Purchasing, a identifié des outils de substitution selon les différents cas d’utilisation de la machine et mis à disposition un guide de substitution. Des formations pratiques sur le terrain ont aussi été organisées pour accompagner les opérateurs. » Ce qui a permis de répondre à 90 % des tâches auparavant réalisées avec une meuleuse de 125 mm : « Certaines configurations ou certains environnements de chantier restaient cependant problématiques », déplore Maude Demenois. Il fallait donc trouver une solution innovante pour ces 10% de tâches impossibles à réaliser avec un autre outil. « Il n’existait aucune meuleuse satisfaisante sur le marché ; nous avons donc lancé un appel d’offres auprès des fabricants pour élaborer un prototype répondant à nos exigences. »

Déploiement de l’outil au niveau mondial
Ce projet est unique en son genre : « Notre cahier des charges techniques est très précis afin que la conception réponde à nos besoins et garantisse une utilisation en toute sécurité ». En mai 2019, la société Fein répond favorablement à l’appel d’offres. Plusieurs réunions vont définir les conditions et modalités du projet, tout en affinant le cahier des charges techniques : « La prochaine étape, c’est la signature du contrat, aujourd’hui, qui lance officiellement le projet. Nous avons demandé une mise à disposition en dix-huit mois.

L’outil sera déployé au niveau mondial et sera en adéquation avec toutes les réglementations. Normalement, début 2021, la machine sera à disposition sur tous nos chantiers », se félicitent les acteurs de la démarche.

Sélectionner les meilleurs outils du marché
Cette démarche est à replacer dans le contexte de la politique générale de Bouygues Construction en matière d’outillage électroportatif. Ainsi la création, en 2017, d’un comité de pilotage pour définir les spécifications de ces outils : « L’objectif est de garantir, avec un référencement sur toutes nos opérations, l’utilisation des outils les plus performants, les plus adaptés en respectant nos critères en matière de santé et de sécurité », détaille Maude Demenois. En résulte une sélection d’outils conformes et toujours en bon état, et leur mise à disposition pour chaque compagnon concerné travaillant sur un chantier Bouygues Construction, qu’il soit collaborateur ou partenaire.

L’ensemble des produits existants et utilisés sont répertoriés, les données techniques et les retours d’expérience du terrain analysés. Des tests et/ou mesures sont pratiqués pour compléter une base de données comparative. L’objectif : sélectionner les meilleurs outils du marché. Et s’ils n’existent pas, pourquoi ne pas demander aux fabricants de les inventer – comme avec le projet de meuleuse très haute sécurité…